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Village lacustre, Bénin

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Village lacustre, Bénin
Type de projet
Adaptation + mode de vie symbiotique avec l'environnement

Partenaires


Concepteur
Communauté des Tofins

Lieu
Ganvié, Lac Nokoué , Bénin
Milieux


Catégorie
Paysage & Ecologie

Type de projet


Modalité d'adaptation


Page du projet

Contexte :

Le lac Nokoué, situé au sud du Bénin, couvre une superficie d’environ 160 km2 en période de hautes eaux et s’étend parallèlement à la côte atlantique dont il est séparé par un cordon de sable brun. Le milieu saumâtre de ce lac est caractérisé par des interactions continentales et marines dues à des apports saisonniers d’eau douce et d’eau salée.

Ce lac constitue le bassin de vie « des hommes de l’eau » depuis plusieurs centaines d’années. Les Tofinu ont su y développer une civilisation de l’eau construisant des cités lacustres autour du lac et vivant des richesses que leur offrait ce milieu.

Concepts clefs du projet :

Ganvie, qui signifie « nous avons survécu », est une ville lacustre, presque « aquatique » faite de maisons sur pilotis, construites en bambou et en teck, et pouvant accueillir plusieurs familles de pêcheurs. Cette architecture vernaculaire de maisons légères construites sur pilotis, au milieu de l’eau, permet ainsi aux habitants de s’adapter aux variations du niveau de l’eau.

La ville est un ensemble de onze villages organisés autour de canaux sur lesquels les habitants naviguent en pirogues. Cette ville flottante comprend un bureau de poste, une banque, un hôpital, une école, une église, une mosquée, un marché flottant, une place royale et quelques hôtels, bars et restaurants.

Elle est entourée d’un récif artificiel de douze mille enclos à poissons. La pêche est la principale source de revenus et d’activité sur le lac, le système d’aquaculture « acadjas » contribuant à 40 % des prises de poissons. Le mode de vie de cette communauté et leurs moyens de subsistance sont étroitement reliés à leur environnement. En effet, les Tofins ont su créer un système d’aquaculture entièrement autonome et basé uniquement sur l’utilisation d’éléments naturels du site.

La profondeur du lac oscille entre 40 centimètres et 3 mètres, le lac Nokoué est un environnement peu profond idéal pour le système d’aquaculture récifale « acadja ». C’est en s’inspirant des habitats naturels, tels que les récifs et les forêts de mangrove, que les Tofinu ont développé un système d’aquaculture similaire, recréant des habitats pouvant accueillir un élevage de poissons fonctionnant en autosuffisance durant toute leur croissance. Ce système d’aquaculture est basé sur la construction d’enclos fabriqués à partir de branches coupées dans les forêts voisines, ce système de branchage resserré est implanté dans le fond boueux des parties les moins profondes du lac. Avant la plantation, les branches sont trempées puis séchées pendant deux semaines pour réduire leur flottabilité. Ce système de branchage artificiel, similaire à une forêt de mangrove, fournit alors un habitat protecteur et des zones d’alimentation qui attirent la faune environnante.

Un grand filet est ensuite enroulé autour des masses de branches pour éviter que les gros poissons ne s’échappent. Grâce à ce dispositif basé sur le vivant, les poissons peuvent se nourrir des détritus et des algues provenant du bois en décomposition, de plus, ils sont protégés des autres prédateurs et peuvent se reproduire à l’intérieur de l’enclos. Les poissons sont ensuite prélevés de deux façons : soit en une seule fois après douze mois, soit par une pêche sélective tout au long de l’année, à l’aide de filets dont les trous sont suffisamment grands pour permettre aux petits poissons de s’échapper. Ceux-ci peuvent occuper le reste du lac de manière sauvage et fournir l’occasion d’une pêche alternative.

Pourquoi on en parle ?

La communauté des Tofinu a réussi à développer un mode de vie en symbiose avec son environnement, elle a su créer un habitat adapté à son milieu et a choisi de vivre sur l’eau plutôt que sur les rives, en découle un style de vie à l’écoute des variations et transformations de son milieu. Elle a su créer un système d’aquaculture autosuffisant qui permet aux poissons de se développer sans ajout extérieur. 

L’adaptation symbiotique de ce peuple à son milieu, et en particulier aux aléas climatiques, en fait un exemple de résilience intéressant à étudier, surtout lorsque l’on sait qu’au cours des trente dernières années, 50 % des forêts de mangroves côtières ont été détruites par la construction de fermes aquacoles.

De plus, ce système de production piscicole a permis à un peuple de vivre en autosuffisance depuis plus de 400 ans, sans impacter son environnement et en concurrençant la productivité et les rendements de l’aquaculture moderne. Les pêcheurs du peuple Tofinu ont réussi à créer une forme d’aquaculture exempte de pollution par les antibiotiques et les pesticides, exempte d’espèces envahissantes, utilisant un dispositif frugal et créant un système récifal qui génère de la nourriture.

Warning

L’afflux de plus d’un million de personnes dans les trois villes situées autour du lac et l’utilisation croissante du système acadja, met en péril la symbiose entre le mode de vie et le système piscicole de la communauté des Tofinu autour du lac. De plus, depuis que l’UNESCO a classé la cité de Ganvie comme patrimoine culturel et touristique mondial, l’affluence de touristes est de plus en plus croissante, risquant de nuire au maintien d’un système socioécologique fragile.

Mise en perspective

Ce processus de production autonome permet d’imaginer ce système piscicole dans des conditions similaires ailleurs. C’est déjà le cas au Bénin, dans d’autres lacs saumâtres mais aussi dans des lagunes ou des étangs d’eau douce en Côte d’Ivoire ainsi qu’au Pérou. Ce système aquacole vertueux constitue un espoir de développement de la pisciculture rurale africaine : il pourrait remplacer l’implantation de fermes aquacoles coûteuses et destructrices de l’environnement.


Pour en savoir plus :